とね日記

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ル・モンド紙:日本の首相が知的世界と戦争

2020年11月08日 14時28分21秒 | フランス語
日本の新総理、菅義偉氏(9月16日、東京)
画像:ロイター通信提供


菅総理による日本学術会議の会員任命拒否をめぐって、先週から国会で論戦が始まった。海外での報道を紹介するのにはよいタイミングである。これまで科学専門誌のサイエンス誌およびネイチャー誌の記事の和訳をブログに掲載したが、今回のブログ記事ではフランスのル・モンド紙に掲載された仏文記事の和訳を紹介する。

元記事:
https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/06/le-premier-ministre-japonais-yoshihide-suga-en-guerre-avec-le-monde-intellectuel_6054962_3210.html


日本の首相が知的世界と戦争
日本学術会議への行政干渉は、学界から強い批判を受けています。

記事:フィリップ・ポン、2020年10月6日12:51

日本の新首相、菅義偉氏は批判的な声がお嫌いのようです。彼は、日本学術会議が推奨する6人の教授からなる国の科学評議会への任命を承認することを拒否したばかりです。政府の長がメンバーの更新に関して日本学術会議の推薦に耳を傾けるのを拒否したのは、初めてのことです。

政治学、法学、歴史学、宗教学の研究分野で著名なこれらの人物を拒否した理由についての説明はまったくなく、この決定は、あらゆる分野の84万人の研究者を代表するこの機関の独立性を保証するプロセスを尊重することよりも、君主の専制的行為によるものであり、(この組織が)学術的な問題について政府に助言し、同様の国際機関との連携を強化するという責任に関わる問題です。

参考記事:菅義偉、将来の首相、安倍晋三の影(仏文)

首相の拒否は抗議を引き起こしました。毎日新聞によれば、菅氏の拒否は「学術研究の自由を脅かす可能性のある政治的介入」を構成しています。日本学術会議の推薦を尊重するよう首相に求める請願が出回っており、2015年にノーベル物理学賞を受賞した梶田隆章会長は、首相に彼の決定を再考すること、そして少なくとも理由を示すよう求める手紙を届けました。政府の官房長官の加藤勝信氏によると、「菅氏は法律の範囲内で行動し、菅氏の選択を検証、正当化する必要はない」とのことです。彼は「首相はこの決定を覆すつもりはない」と付け加えました。

« 独立した組織 »

早稲田大学の行政法教授の岡田正則氏は、朝日新聞に対して、日本学術会議は「独立した組織であり、首相が誰に会員になるかどうかを決定することは容認できない」と主張しています。梶田氏は、「日本学術会議は研究者の業績に基づいて決定を下します。この原則に疑問を投げかけてはなりません」。月曜日(10月6日)の記者会見で、菅氏は彼の決定が「政治的なものではない」と述べました。

法的には首相の指導下に置かれていますが、日本学術会議は、正式な手続きとして推薦するメンバーを首相に提出し、これまでの首相はその推薦をそのまま承認してきました。これは少なくとも、1983年に当時の中曽根康弘首相が言っていたことです。菅氏の前任者である安倍晋三首相は、日本学術会議のメンバーの任命方法を変えようとしていましたが、学問の自由を保証する機関に対し、事実上の行政統制を実施しませんでした。

参考記事:日本の民主主義の大きな不幸(仏文)

首相が日本学術会議の研究者を任命したり解任したりする権利をめぐる法的議論の背後には、政府にあまりにも公然と批判的な研究者を排除するための、ベールに包まれた行政干渉の危険性があります。

日本学術会議が推薦した105人の候補者のうち、任命拒否された6人の共通点は、菅氏が前任の安倍氏の8年間の政策に批判的であることです。歴史学者の加藤陽子氏や憲法学者の小沢隆一氏などは、平和主義的な条項を無効にするための憲法改正に反対しています。一方、行政法を専門とする岡田正則弁護士は、沖縄の米軍新基地建設を批判しています。

« 赤軍の巣窟 »

科学倫理や意見の自由を尊重するという点で、6人の人物を排除した横暴は、菅氏が安倍内閣の官房長官として発揮した権力行使の縦割りの姿勢の証明となります。

能力よりも忠誠心に基づいた一連の人事で政権を掌握し、様々な形での自己検閲圧力でメディアを煽り(2020年、国境なき記者団の報道の自由度指数で日本は180カ国中66位)、今や総理大臣となった菅氏は、学界を攻撃しています。東大法学部の佐藤岩夫教授は「政府の任命権への干渉は危険であり、政教分離の関係を変えるものだ」と話しています。

アメリカ占領下で設立されて以来、日本学術会議は右派から「赤軍の巣窟」として認識されてきました。時代は確かに変わりましたが、意見の自由への攻撃ともいえる菅氏の決断は、日本の知識人の世界にかなりの不安を与えています。

記事:フィリップ・ポン


関連記事:

サイエンス誌:日本の新首相、日本学術会議(SCJ)との戦いを選択
https://blog.goo.ne.jp/ktonegaw/e/8892ba9db7f928d7e0124073350caeab

ネイチャー誌:これまで以上にネイチャー誌が政治をカバーしなければならない理由
https://blog.goo.ne.jp/ktonegaw/e/4be5323228aade9b232fea3b4b796a94

フィナンシャルタイムズ紙:日本学術会議スキャンダルが菅政権の蜜月時代を脅かす
https://blog.goo.ne.jp/ktonegaw/e/39d3cee6f630b01f8c9df532b5565626

ロイター通信:日本の菅政権、学術会議の任命拒否の弁明に非難
https://blog.goo.ne.jp/ktonegaw/e/25ce64d8f43c3fa093d64b8b43105556


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フランス語記事全文:

Photo: Le nouveau premier ministre japonais, Yoshihide Suga, le 16 septembre à Tokyo. REUTERS

Le premier ministre japonais, Yoshihide Suga, en guerre avec le monde intellectuel
L’ingérence de l’exécutif dans une institution scientifique suscite de vives critiques dans les milieux académiques.
Par Philippe Pons Publié le 25 septembre 2020 à 06h30

JLe nouveau premier ministre japonais, Yoshihide Suga, n’aime pas les voix critiques. Il vient de refuser d’entériner la nomination au Conseil scientifique du pays de six professeurs recommandés par cette institution. C’est la première fois qu’un chef du gouvernement refuse de tenir compte des recommandations du Conseil pour le renouvellement de ses membres.

Sans la moindre explication des raisons du rejet de ces personnalités connues dans le domaine de la recherche en science politique, droit, histoire et religion, cette décision tient plus du fait du prince que du respect du processus garantissant l’indépendance de cette institution représentant 840 000 chercheurs de toutes les disciplines chargée de conseiller le gouvernement sur des questions académiques et de renforcer les liens avec des organisations internationales similaires.

Lire aussi Yoshihide Suga, futur premier ministre du Japon, ombre portée de Shinzo Abe

Le veto du premier ministre a soulevé un tollé. Selon le quotidien Mainichi, le veto de M. Suga constitue une « intervention politique qui peut menacer la liberté de la recherche académique ». Une pétition circule appelant le premier ministre à respecter les recommandations du Conseil scientifique, et son président, Takaaki Kajita, prix Nobel de physique en 2015, a remis en mains propres au premier ministre une lettre lui demandant de revenir sur sa décision et, au moins, d’en donner les raisons. Selon le porte-parole du gouvernement, Katsunobu Kato, « M. Suga a agi dans le respect de la loi et il n’a pas à justifier un choix ». Il a ajouté que « le premier ministre n’entend[ait] pas revenir sur cette décision ».

« Organisme indépendant »

Masanaori Okada, professeur de droit administratif à l’université Waseda, fait valoir dans le quotidien Asahi que le Conseil scientifique est « un organisme indépendant et qu’il est inacceptable que le premier ministre décide de ceux qui méritent ou non d’en être membres ». Pour M. Kajita, « le Conseil prend ses décisions en fonction des travaux des chercheurs. Ce principe ne doit pas être mis en cause ». Au cours d’un point de presse, lundi 6 octobre, M. Suga a affirmé que sa décision « n’avait rien de politique ».

Bien que placé juridiquement sous la tutelle du premier ministre, le Conseil soumet pour la forme la nomination des membres au chef de l’exécutif qui jusqu’à présent entérinait ses choix. C’était du moins ce qu’avait déclaré en 1983 le premier ministre de l’époque, Yasuhiro Nakasone. Le premier ministre Shinzo Abe, prédécesseur de M. Suga, entendait changer le mode de désignation des membres du Conseil, mais il n’avait pas mis à exécution cette mainmise de fait de l’exécutif sur une institution garante de la liberté de la recherche académique.

Lire aussi Le grand malaise de la démocratie japonaise

Derrière le débat juridique sur le droit du premier ministre de nommer ou d’évincer des chercheurs du Conseil se profile le risque d’une ingérence voilée de l’exécutif pour écarter des chercheurs trop ouvertement critiques du gouvernement.

Sur les 105 candidats recommandés par le Conseil scientifique, les six rejetés ont en commun d’être critiques de la politique menée pendant huit ans par M. Abe, dont M. Suga se veut le continuateur. Ainsi, l’historienne Yoko Kato ou le constitutionnaliste Ryuichi Ozawa s’opposent à la révision de la Constitution destinée à vider celle-ci de ses dispositions pacifistes. Le juriste spécialiste de droit administratif Masanori Okada critique pour sa part la construction d’une nouvelle base militaire américaine à Okinawa.

« Nid de rouges »

L’exclusion de six personnalités connues pour leur intransigeance dans le respect de la déontologie scientifique et de la liberté d’opinion témoigne d’une conception verticale de l’exercice du pouvoir que M. Suga avait démontrée en qualité de secrétaire général des cabinets Abe.

Après avoir mis au pas la haute administration par un jeu de nominations en fonction souvent de l’allégeance plus que de la compétence, et avoir incité les médias par des pressions diverses à s’autocensurer (en 2020, le Japon occupe la 66e place sur 180 pays dans le classement de la liberté de la presse établie par Reporters sans frontières), M. Suga, devenu premier ministre, s’en prend au monde académique. « Les interférences du gouvernement dans les nominations constituent un danger et modifient la relation entre la politique et le monde académique », estime Iwao Sato, professeur de droit de l’université de Tokyo.

Depuis sa création sous l’occupation américaine, le Conseil scientifique a été perçu par la droite comme un « nid de rouges ». Les temps ont certes changé mais la décision de M. Suga, ressentie comme une atteinte à la liberté d’opinion, suscite un malaise certain dans le monde intellectuel japonais.

Philippe Pons

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