西尾治子 のブログ Blog Haruko Nishio:ジョルジュ・サンド George Sand

日本G・サンド研究会・仏文学/女性文学/ジェンダー研究
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    [Marseille, 17 mars 1839.]

2021年02月03日 | サンドの言葉より

À CHARLOTTE MARLIANI

    [Marseille, 17 mars 1839.]

    Chère amie, que vous êtes aimable et bonne de vous

occuper de moi comme vous faites !  Quand donc, moi, vous

serai-je bonne à quelque chose ?

    Puisque Buloz vous remet l’argent de Simon, envoyez-le

moi car celui que Chopin attend de son éditeur souffre quelque

retard et je touche avec mon hôtesse au quart d’heure

de Rabelais.  Dans ma dernière lettre à Buloz que je vous ai

fait passer je lui demandais de m’envoyer le tout à la fois,

mais j’aime autant avoir quelque chose tout de suite.  Vous

aurez, dans peu de jours, mon article sur Mickiewicz qui

sera je crois plus long que je ne l’annonçais.  Quant aux

Cordes de la lyre, tenez ferme, chère amie, pour qu’elles soient

insérées dans la revue.  La forme convient aussi bien que

toute autre chose à la revue, mais ne voyez-vous pas que

notre Buloz hésite et recule parce qu’il y a cinq ou six phrases

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assez hardies et que le cher homme craint de se brouiller

avec son cher gouvernement ?

    Ne lui dites pas que j’en vois bien la raison, mais insistez.

Je couperai où il faudra, mais je ne consentirai pas à perdre

la meilleure voie de publication et 2 500 f. dont il ne pourrait

me dédommager qu’à mes propres dépens.  Quant au moyen

de le publier, il faut qu’il se résigne à en faire deux numéros.

Il pourrait même y consacrer un n[umér]o tout entier de

la Revue.  Il a toujours le moyen de s’en tirer quand il en a

envie.  Les actes sont coupés en parties différentes, il est

bien aisé de diviser.  Leroux se chargerait de décider si c’est

après le 2e ou le 3e acte qu’il faut faire la coupure, moi je ne

me souviens pas de l’étendue de ces actes, ni de la distribution

des sujets traités dans les différents actes.  Envoyer ici

le manuscrit et le renvoyer serait trop long.

    En outre, je voudrais que cela parût, car plus la Revue

tarde à m’insérer plus les réimpressions tardent à venir et

conséquemment je me trouve gênée, faites-le marcher, ma

chère belle.  Aux termes de mon traité il est obligé d’insérer

sans aucun retard tout ce que je lui donne.  Traitez-le toujours

avec douceur c’est le meilleur moyen d’en venir à bout.

Mais ne soyez pas dupe de ses petites lâchetés.  Je sais aussi

bien que lui ce qui serait hors de place dans la revue, à

preuve que je me suis résignée à perdre moitié sur Lélia

plutôt que de faire fragmenter cette longue tartine.  Il faut

vous dire aussi que tout ce qui est un peu profond dans

l’intention effarouche le Bonnaire et le Buloz, parce que

leurs abonnés aiment mieux les petits romans comme André

et compagnie qui vont également aux belles dames et à leurs

femmes de chambre.  Ces messieurs espèrent que je vais

bientot leur donner quelque nouvelle à la Balzac.  Je ne

voudrais pas pour tout au monde me condamner à travailler

dans ce genre éternellement, j'espère que j'en suis sortie

pour toujours.  Ne le dites pas à notre butor, mais à moins

qu’il ne me vienne un sujet où ces petites formes communes

puissent envelopper une grande idée, je n’en ferai plus,

j’en ai trop fait.  D’ailleurs je crois qu’on en a assez fait et

que ce genre s’épuise !  Il tombe dans le commun le plus

commun.  Laissez gémir Buloz, qui pleure à chaudes larmes

quand je fais ce qu’il appelle du mysticisme, et poussez à

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l’insertion.  Il faut bien que les lecteurs de la revue se fassent

un peu moins bêtes, puisque moi je me fais moins bête de

mon côté.  Pardon, chère bonne amie, de tous ces détails,

mais je suis sûre que vous m’approuverez.  Encore un mot

pour en finir avec Buloz faites-moi envoyer la Revue depuis

le dernier n[umér]o de Spiridion.  J’avais écrit à Buloz de me

l’adresser ici, il ne l’a pas fait.

    Chopin va toujours très bien.  Il me charge de vous remercier

bien tendrement de tout l’intérêt que vous prenez de

lui.  Soyez sûre que lui aussi vous aime bien, et que chacune

de vos lettres est une fête pour nous deux.  Le Docteur est

très content de sa santé, il nous mène souvent promener

et dîner ensuite chez lui où il nous traite en gourmets.  Hier,

il a versé à son malade un demi-verre de champagne coupé

d’eau, quand il lui en versera un pur, il sera bu à votre santé.

    Je vous quitte, voici notre bon Docteur et il n’y a pas

moyen de causer avec d’autres qu’avec lui, même avec

vous; vous savez que le Docteur ne tarit guère.  Il vous dit

mille compliments, mille amitiés.

    Je ferme ma lettre, car l’heure du courrier arrive, et je

veux vous embrasser par ce courrier.

    George

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