内的自己対話-川の畔のささめごと

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ジョルジュ・シャルボニエ『画家の独白』入手

2023-01-07 23:59:59 | 読游摘録

 『眼と精神』に引用されている Georges Charbonnier の Le Monologue du peintre の原本は1959年と翌年に二巻に分けて Julliard という出版社から刊行されている。メルロ=ポンティが引用しているのはいずれも上巻に収められた対談である。上下巻合わせて36人の芸術家(主に画家だが、彫刻家、建築家も含まれている)たちとの対談が収録さている。日本でもよく知られている名前として、ジョルジュ・ブラック、マックス・エルンスト、アルベルト・ジャコメッティ、アンリ・マティス、サルヴァドール・ダリ、マルク・シャガール、ジョルジュ・ルオー、ル・コルビュジエ、ベルナール・ビュッフェなどを挙げることができる。
 この談話集の基になっているのは、1950年から1951年にかけて、そして1956年から1957年にかけてフランス・ラジオ・テレビ(Radiodiffusion-télévision française=RTF、のちの France culture)のラジオ番組での対談である。五十年代のフランスでラジオ番組が文化・教養の伝播に果たした役割は大きい。シャルボニエはこの年代にきわめて重要な対談を驚くべき密度で企画し実現させている。レヴィ=ストロースとの対談は特に有名だが、メルロ=ポンティともほぼ同時期に十回に亘って対談を行っており、そのうちの九回が一九五九年に放送されている(現在、Entretien avec Georges Charbonnier, Verdier, 2016 にすべて収録されている)。
 Le Monologue du peintre は初版から二十年後の1980年に第二版が Éditions Guy Durier という書肆から出版されている。この第二版にはシャルボニエ自身が序文を寄せている。私が今回購入したのは、2002年に Éditions de la Villette から一巻本として出版された第三版の中古本である。字のサイズが10ポイントで行間も狭くぎっしりとテキストが詰め込まれているが、上質の紙を使ってあり、しかもしっかりとした糸かがりの製本である。これで定価が12€というのだから驚きである。私が購入した中古本はほぼ新品で値付けは12€だったが、正当だと思う。
 この本のおかげで『眼と精神』の中の引用で省略されている部分を読むことができた。少し長くなるが、メルロ=ポンティによって引用された箇所の前後を復元して以下に掲載する(引用中、G. C. はジョルジュ・シャルボニエ、A. M. はアンドレ・マルシャンを指す)。

 G. C. – Dans le cours de votre expérience de peintre, est-ce que cet écran constitué par les apparences vous est apparu plus ou moins solide selon les période ?
 A. M. – Lorsque j’étais très jeune, je me promenais dans la campagne à Aix, puisque je suis né dans cette ville, et je me promenais dans ces grands paysages que Cézanne a peints et magnifiés. J’étais très, très jeune, très jeun homme, et je sentais, au fond, que, derrière le monde de l’apparence, déjà, surgissait un monde autre et qu’il fallait traduire. Il fallait arriver à percer l’apparence et à traduire ce monde autre sur la toile. C’est une entreprise très difficile. Et longue. Et lente. N’est-ce pas ?
Il faut d’abord une grande accoutumance du monde visible pour arriver à le désintégrer, à voir son âme, à voir ce qui se cache à l’intérieur. Par exemple, dans une forêt, j’ai senti à plusieurs reprises que ce n’était pas moi qui regardais la forêt. J’ai senti, certains jours,  que c’étaient les arbres qui me regardaient, qui me parlaient. Moi, j’étais là… écoutant. Ce n’était pas moi qui regardais l’arbre. C’est l’arbre qui me regardait.
Donc, je sentais, certains jours, que la nature contenait vraiment ce monde du dedans, c’est âme du dedans, cachée à nos regards et terriblement obsédante. Je l’ai vu et je l’ai senti à plusieurs reprises. Si je suis sur des grandes plages désertes, au bord de la mer, ce n’est pas moi qui regarde la mer, c’est la mer qui me regarde, qui me parle, qui me dit certaines choses que j’écoute pendant des jours, là, tout seul. Il faut une grande solitude, il faut être seul, absolument seul. Ensuite, je rentre dans mon atelier, et je dis sur la toile ce que la mer m’a dit, ce que l’océan m’a dit. Mais ce n’est pas moi qui regarde l’océan, c’est l’océan qui me regarde. C’est un corps de femme qui me regarde. Ce n’est pas moi qui regarde le corps de femme. Ce que je suis devant une femme nue, c’est ce corps de femme qui me regarde.
 G. C. – Le rôle du peintre, est-ce répéter ?
 A. M. – C’est traduire. C’est s’effacer devant le monde. Le rôle du peintre est l’effacement. Le peintre doit s’annuler, s’effacer. Je crois que le peintre doit être transpercé par l’univers et non vouloir le transpercer.
 G. C. – C’est le contraire de la position scientifique. Le savoir du savant est un savoir agressif.
 A. M. – C’est un savoir agressif, mais c’est d’abord un savoir de contemplation. Ce n’est qu’après la contemplation que le savant passe à l’action.
 G. C. – Il veut savoir pour agir. Vous ne voulez pas savoir pour agir ? Vous ne cherchez aucunement à modifier l’ordre des choses ?
 A. M. – Ah ! Aucunement. J’attends d’être transpercé par les choses.
 G. C. – Et quand vous voulez atteindre l’âme des choses – je crois qu’on peut employer cette expression, en ce qui vous concerne…
 A. M. – En effet : l’âme des choses.
 G. C. – Lorsque vous souhaitez atteindre l’âme des choses, vous ne souhaitez pas arriver à prévoir leur structure au sens où le physicien emploierait ce terme ?
 A. M. – Non, non.
 G. C. – Le nombre n’a pas de rôle dans votre appréhension de la nature.
 A. M. – Cette âme doit m’arriver dessus. Elle doit me submerger. Si je ne suis pas submergé par cette âme des choses, cette âme de l’intérieur des choses, je ne peins pas. J’attends d’être intérieurement submergé, enseveli. Je peins peut-être pour surgir.

 Le Monologue du peintre, Éditions de la Villette, 2002, p. 110-111.